Pierre Loti. Les multiples vies de la statue des veuves

Logo Télégramme
Publié le 14 juillet 2017     Marie-Hélène Clam
© Le Télégrammehttp://www.letelegramme.fr/cotesarmor/pierre-loti-les-multiples-vies-de-la-statue-des-veuves-14-07-2017-11595546.php#YHfMItKbG3PfLv2z.99

 

PPL_VEUVESISLANDAISS-2.JPG_mh.clam

Charly Sallé le sculpteur, et Serge Le Quéau, président de l’association Pierre Loti à Paimpol, devant les « Veuves d’Islandais ».

 

Une statue hommage à l’oeuvre de Pierre Loti et à la mémoire des pêcheurs d’Islande a été rêvée dès les années 30. Après bien des péripéties, elle a enfin trouvé sa place, en avril, à Ploubazlanec, face à l’île de Bréhat. Elle a été officiellement inaugurée le 15 juillet 2017.

 

Ploubazlanec. Les « Veuves d’Islandais » célébrées

Publié le 15 juillet 2017 à 16h11 Modifié le 15 juillet 2017 à 16h14

La statue hommage à Pierre Loti et aux pêcheurs d’Islande a été inaugurée, samedi matin, en grande pompe, sur le site de Lann Vraz. Quelque 200 invités ont pu découvrir ces fameuses « Veuves d’Islandais », l’œuvre de Charly Sallé.

http://www.letelegramme.fr/cotes-darmor/ploubazlanec/ploubazlanec-les-veuves-d-islandais-celebrees-15-07-2017-11597843.php?utm_source=rss_telegramme&utm_medium=rss&utm_campaign=rss&xtor=RSS-22

 

Gaud, veuve d’un des « Pêcheurs d’Islande » de Loti, et la grand-mère Moan, le regard fixé sur le large, guettent désespérément le retour des marins. Les héroïnes de granit sont installées depuis fin avril sur le site magique de Lann Vras, à Ploubazlanec, face aux cailloux qui baignent Bréhat. « Il y a quatre-vingt-sept ans qu’on l’attendait, cette statue ! », pointe Serge Le Quéau, président de l’association Pierre Loti à Paimpol (APLP), grand relanceur du projet, en 2010.

Médaille d’or pour Francis Renaud

La première idée d’une statue remonte à 1930 : le conseil municipal de Ploubazlanec décide d’ériger un monument à la mémoire de Pierre Loti et des pêcheurs d’Islande. Enthousiasme général surtout pour le Paimpolais Armand Dayot, inspecteur général des Beaux-Arts qui lance une souscription publique. En 1931, la réalisation de l’oeuvre est confiée au sculpteur briochin Francis Renaud, déjà connu pour sa « Pleureuse » (aussi appelée « La douleur ») à Tréguier. Sa maquette en plâtre, présentée au salon des artistes français à Paris en 1932 obtient même la médaille d’or, la plus haute distinction pour l’époque. Mais le temps passe, les financements n’arrivent pas et le projet s’enlise, au grand regret de Mgr Jean Kerlévéo. « Théologien, grand connaisseur de l’histoire de Paimpol et spécialiste incontesté de Pierre Loti », note Serge Le Quéau. « Il se méfiait pourtant de l’écrivain officier de marine, le trouvant un peu trop protestant, un peu trop original. Mais il est devenu son défenseur acharné après l’avoir rencontré. Il était capable de réciter des pages entières », poursuit-il.

Le prêtre blanc trinque avec le syndicaliste rouge

Le courant passe bien entre ces deux hommes que rien n’aurait dû réunir. Et l’histoire se répète entre l’ecclésiastique et le militant Le Quéau (membre de l’équipe fondatrice d’Attac). « Nous avons sympathisé autour de l’oeuvre de Loti, le prêtre blanc trinquant avec le syndicaliste rouge », s’amuse-t-il. Au point de promettre à Jean Kerlévéo, peu avant sa mort, de reprendre le flambeau. Ce n’est que dix ans plus tard qu’il pourra relancer la machine à sculpture, avec le montage de l’association APLP. Nouvelle souscription : 186 donateurs et 62.000 € plus tard, le projet « Veuves d’Islandais » est de nouveau sur les rails. Au burin, c’est le sculpteur de Plérin, Charly Sallé qui s’y colle. Il réalise en trois ans, une fidèle copie de la maquette de Francis Renaud. « C’était un sacré défi technique, il fallait l’agrandir de 4,38 fois. En 1995, j’avais récupéré une revue sur les pêcheurs d’Islande. On y voyait Gaud, c’était un signe », note l’artiste. Restait à trouver le bon emplacement et cela fut loin d’être simple. Sur le port ou la place du Martray, à Paimpol, près de la Croix des veuves, à Pors-Even… Aucun ne faisait consensus. Projet maudit ? Que nenni. Serge Le Quéau et sa joyeuse bande de mordus de Loti ne lâchent rien. « C’est finalement Lann Vraz qui est pointé à la réunion de la dernière chance. On a été époustouflés par la beauté du site. Ici, le visiteur pourra tourner autour », se réjouit Serge Le Quéau. Pour Francis Renaud, cette statue était « sa plus grande fierté mais aussi son plus grand regret qu’elle n’ait jamais été réalisée de son vivant ». C’est désormais chose faite, et bien faite.

Cliquez sur « articles précédents » situés tout en bas de cette page pour consulter toutes les actualités.