Actualités – décembre 2025

Décembre 2025

 

Hommage à Jean Aicard par Monique Broussais

Toulon rend hommage à l’un de ses plus illustres enfants, Jean Aicard, né en 1848 près du port que connaissait bien son ami Pierre Loti.

Une série de photos grand format est exposée sur les grilles du jardin Alexandre 1er. Elles représentent des vues de Toulon et de ses environs sur lesquelles figurent de petits textes manuscrits signés Jean Aicard.

Une inauguration présidée par l’Amiral Tanguy, adjoint au maire, délégué à culture a eu lieu en présence de Monsieur Guy Raynaud, adjoint responsable des médiathèques et des archives ayant fourni ces documents ainsi que de Jean Pascal Faucher, chargé du musée des Lauriers roses de La Garde et Monique Broussais, membre des Amis de Pierre Loti représentant le musée de Solliès-Ville.

Ce moment a été agrémenté par la présence de comédiens des groupes Larsen et Les Lauriers d’Aicard qui, costumés, sous les traits de Jean Aicard, Mayol, Sarah Bernhard et Pierre Loti ont animé avec brio une déambulation poétique et musicale

Un moment agréable au cours lequel a été évoqué une fois encore l’amitié fraternelle unissant Jean Aicard et Pierre Loti.

L’exposition est visible jusqu’au 31 mars 2026.

 Chalucet 1

1 Loti et Mayol devant Solliès-Ville

Chalucet 5

2 Jean, Sarah, Félix et Pierre (de dos)

 

 Reportage en images dans la fascinante maison de Pierre Loti récemment restaurée en Charente-Maritime | Historia

Reportage en images dans la fascinante maison de Pierre Loti récemment restaurée en Charente-Maritime

Paquebot immobile où il a voulu conjurer le temps, la maison Loti à Rochefort offre une plongée fascinante dans l’univers de ce grand voyageur épris d’Orient. Entrez dans la légende restaurée après des années de travaux !

HIAHS_078_Auguste.jpegloti.jpeg

Cette perspective depuis le jardin, redessiné et replanté à partir de photos d’époque, offre une vue sur les façades sur cour de la maison, avec le mélange des styles architecturaux. Ainsi, cet étage à colombages, détruit après la mort de Loti, qui a été reconstitué à l’identique. (Manuel Cohen)

 

Par Denis Lefebvre

À une dizaine d’encablures de l’Océan, Rochefort- sur-Mer a longtemps tiré sa fortune de l’arsenal, créé dans la seconde moitié du XVIIe siècle. Une page s’est tournée au XXe siècle, mais la ville a su vivre malgré tout, se développer et réhabiliter de beaux espaces, comme la Corderie royale. De son passé, elle a gardé un plan en damier, avec de longues rues tirées au cordeau bordées de maisons aux façades en pierre de tuffeau blanche. L’une d’elles s’appelle, depuis 1919, « rue Pierre-Loti » et son numéro 135 connaît depuis près de cent cinquante ans une destinée extraordinaire.

Cette perspective depuis le jardin, redessiné et replanté à partir de photos d’époque, offre une vue sur les façades sur cour de la maison, avec le mélange des styles architecturaux. Ainsi, cet étage à colombages, détruit après la mort de Loti, qui a été reconstitué à l’identique. Manuel Cohen

La maison de Pierre Loti. Manuel Cohen

L’écrivain, voyageur et académicien Pierre Loti y est né en 1850 sous le nom de Julien Viaud. Il en a fait, jusqu’à son décès en 1923, son port d’attache et, surtout, pour reprendre les mots de Claude Stéfani, conservateur en chef des musées de la ville, un « décor de théâtre », l’écrin de ses souvenirs. Sacha Guitry, qui avait le sens des formules, a vu dans cette maison « un livre de lui, ou plutôt un recueil de ses pages choisies ». Toutes les périodes de sa vie et toutes ses passions y sont représentées. L’ensemble est imposant, formé de trois maisons : la première, celle de la famille, et deux autres achetées par Loti lui-même en 1895 et 1897.

Il les a réunies sans se préoccuper des détails techniques, abattant plusieurs murs porteurs, faisant sauter des planchers, ajoutant un étage, mais affaiblissant la structure générale. À sa mort, son fils Samuel hérite de l’ensemble, qu’il vend à la ville de Rochefort en 1969. Quatre ans plus tard, la maison est ouverte au public, puis classée en 1990 au titre des Monuments historiques.

Une maison à reconstruire

En 2012, une partie du plafond de la mosquée, centre névralgique et nostalgique de cette maison, s’effondre. Le couperet tombe : la maison est fermée au public cette année-là. Elle doit son salut au Loto du patrimoine. Malgré les protestations d’associations arméniennes qui n’oublient pas que l’écrivain, turcophile viscéral et détestant les chrétiens d’Orient, a apporté sa caution au génocide de 1915, les premiers fonds sont réunis pour sauver ce plafond.

L’une des pièces majeures de la mosquée est le plafond en bois de peuplier du XVIIe s. richement orné. Manuel Cohen

Puis tout s’enchaîne. Un chantier hors norme s’ouvre pour restituer l’esprit du lieu, revenir au plus près, à la maison telle qu’elle était en 1923 à la mort de Loti : 34 corps de métiers se sont succédé à partir de 2020 dans ce chantier qui a coûté au total plus de 13 millions d’euros. Depuis juin dernier, la maison est rouverte au public.

Suivez le guide !

La famille Viaud s’impose dans les deux premières pièces, sans aucune fantaisie : deux salons bourgeois à souhait, le rouge et le bleu. Le rouge se veut un retour à l’enfance : une boîte à souvenirs pour figer le temps. Le bleu est celui de sa femme, Blanche, un décor convenu pour une femme de la bourgeoisie. Blanche, celle qui restait à la maison pendant qu’il voyageait et la trompait, avec des femmes et des hommes. Pour retrouver Loti dans sa magnificence, ses délires aussi, il faut gagner tout d’abord la salle Renaissance, majestueuse à souhait, qui reprend les codes des salles d’apparat de châteaux. Loti y reçoit ses invités de marque.

Très haute de plafond, la salle Renaissance édifiée en 1897 s’élève jusqu’au deuxième étage de la maison. Manuel Cohen

C’est là que son corps a été exposé à sa mort en 1923, veillé par deux marins en armes, sous un amoncellement de couronnes, dont l’une en forme d’ancre. Le voyage continue avec la pagode japonaise, aménagée en 1886. Japonaise ? Ce serait trop simple, rien ne l’est jamais avec Loti : ce fouillis relève plutôt de l’Extrême-Orient, avec des objets venus de Chine, du Tonkin, du Japon quand même, et aussi d’autres achetés à Paris, au Bon Marché ! Le tout donne un sentiment de tape-à-l’œil. Extrême-Orient encore, avec la salle chinoise, autrefois meublée par les trésors de la Cité interdite pillée au moment de la révolte des Boxers : Loti s’est, comme tant d’autres, servi… 800 kg au total.

Elle a été inaugurée en 1903 par une fête extravagante en présence de 200 invités tous revêtus de costumes traditionnels, certains d’entre eux sont venus en pousse-pousse depuis la gare de Rochefort ! Cette salle chinoise a été détruite par un incendie au début des années 1920 puis démantelée par Samuel. Grâce à des documents d’époque et au talent d’artisans d’exception, elle a pu être reconstituée jusque dans ses moindres détails.

Un romantisme éclectique

L’étage s’impose ensuite, avec la salle à manger, symbole de l’ascension sociale de l’écrivain. On se croirait presque dans un roman de Walter Scott revisité par Victor Hugo. Tout se mélange ici, au fil des achats, avec des éléments de boiserie anciens et d’autres qui ne le sont pas, des coffres bretons, des tentures à fleurs de lys, une porte de tabernacle et les remplages gothiques du XVe siècle de l’église de Marennes achetés pour compléter ce décor. Loti y organise des soirées spectaculaires, ainsi celle d’avril 1888, où il incarne Louis XI, avec jongleurs, ménestrels… Tout le monde est revêtu de costumes d’époque !

La salle gothique, aménagée en 1887-1888 au premier étage, est la première réalisation architecturale de grande ampleur dans la maison. Manuel Cohen

Cantonnés sur une galerie, des Rochefortais portant des sarraus assistent à ce spectacle. Plus classique, la chambre de madame, de style Empire dans les tons bleu, or et jaune, avec son plafond ordonné d’abeilles en stuc. Classique également, la chambre des grands-mères, un sanctuaire pour Loti. Dans un coin, à peine une pièce, l’évocation de sa chambre d’enfant, avec quelques jouets au sol. Ensuite, le visiteur gagne la mosquée, la pièce la plus spectaculaire, achevée en 1897. Une mosquée, vraiment ? Ne s’agit-il pas plutôt, pour le maître de maison, de composer un décor propice à des divagations oniriques vers les lieux qu’il a chéris dans ses voyages ?

« Une angoisse délicieuse »

Tout laisse pantois dans cette pièce comme le plafond syrien du XVIIIe siècle incrusté d’or, un mihrab, des cénotaphes couverts de soieries orientales, des colonnes majestueuses, une fontaine à ablutions, des céramiques venues d’un peu partout, achetées ou « récupérées » au fil des années. Il fait de cette « mosquée » un théâtre, pour des pièces qu’il se joue pour lui seul, perdu dans ses rêves, ou pour des personnalités lui rendant visite.

La mosquée est le clou du spectacle : pour le maître des lieux, cette pièce était « le coin où on attend l’âme ». Manuel Cohen

Dans un article intitulé « La Maison enchantée » publié le 26 octobre 1918 dans La Revue hebdomadaire, Alice-Louis Barthou, la femme de l’homme politique, rend compte du spectacle « troublant, attirant, un peu angoissant, mais d’une angoisse délicieuse » auquel elle a assisté : un domestique monte dans un faux minaret, et lance l’appel à la prière, puis d’autres entrent dans cette pièce, font leurs ablutions et se prosternent sur les tapis. Dans son célèbre roman Aziyadé paru en 1879, Loti écrit : « J’ai pour règle de vie de faire toujours ce qui me plaît. » Sa maison en apporte la preuve.

Jouxtant la mosquée, le salon turc est la première pièce dans laquelle Loti a mis en scène sa fascination pour les cultures orientales. Manuel Cohen

Une grande partie des pièces respirent les excès, l’exubérance. Pourtant, l’endroit le plus étonnant de l’édifice est… le plus modeste, le plus sobre. Le plus intime, aussi : sa chambre. Un lit de fer, un bureau tout simple, des murs blanchis, une vierge en chromo, un bouddha… Est-ce la cellule d’un moine, d’un anachorète ? Allez savoir. Comment, en s’y recueillant, ne pas penser à son autre chambre, au dernier étage de la maison de sa sœur Marie, à Saint-Porchaire, à 30 km de Rochefort, avec ses murs eux aussi blancs et elle aussi presque vide de mobilier. Elle symbolisait le paradis sur Terre dans la maison du bonheur, alors que tout lui semblait possible.

Mondes opposés si proches

Des décennies plus tard, à Rochefort, tout devient différent : il a écrit avoir voulu cette « simplicité blanche, cette impersonnalité définitive, ce renoncement sans retour ». Simplicité face à la mort, dont il avait peur, autant que de vieillir ? Elle approche, inéluctable. Un autre Loti émane de cette pièce, même si une porte, presque dérobée, communique directement avec la mosquée. Deux mondes si proches l’un de l’autre et pourtant si différents ! Le sort a voulu qu’il décède le 10 juin 1923 dans une autre propriété, à Hendaye. Quelle pièce de cette fascinante maison de Rochefort permet au visiteur de mieux comprendre l’âme de Pierre Loti ? Le mystère reste entier.

Pierre Loti, ou plutôt Julien Viaud, en grand uniforme de lieutenant de vaisseau. Manuel Cohen

 Pierre Loti : un aspirant écrivain sur l’île de Pâques | Historia

Pierre Loti : un aspirant écrivain sur l’île de Pâques

En 1872, jeune marin de 21 ans, le futur homme de lettres, qui s’appelle encore Julien Viaud, fait une escale sur l’île de Pâques. Une découverte décisive dans sa vie et sa carrière.

Pierre_Loti_(Abot).jpg

Portrait gravé de Pierre Loti par Eugène Abot. (Wikimedia Commons)

 

Par Xavier Donzelli

Publié le 12 févr. 2019 à 18:18Mis à jour le 20 août 2023 à 13:27
Réservé à nos abonnés

Que représentent quatre jours sur une île lointaine au regard de quarante années de carrière dans la marine, dont dix-sept passées à sillonner les mers du globe ? A priori, pas grand-chose. Pourtant, au soir de sa vie, c’est ce bref séjour sur l’île de Pâques, du 3 au 7 janvier 1872, et les quelques objets qu’il en a rapportés, que Pierre Loti voudra sauver de l’oubli. Son biographe Alain Quella-Villéger raconte la scène : « Dans les « dernières volontés » remises à son secrétaire, Gaston Mauberger, Pierre Loti, qui se soucie peu que l’on conserve après sa mort l’essentiel des richesses accumulées dans son extraordinaire maison de Rochefort, fait une exception remarquable : « Sur la commode, il est des objets très curieux, qui viennent de l’île de Pâques et auxquels je tiens un peu. » » Et le biographe de s’interroger : « Pourquoi, aux portes de la mort, l’écrivain-voyageur revient-il sur ces rares journées de janvier 1872 ? »

L’île de Pâques !… Ce « finistère du Pacifique » (Maurice Leenhardt) isolé à plus de deux mille kilomètres des premières terres habitées ; le pays des moais, ces statues anthropomorphes de plusieurs tonnes, sculptées dans le tuf (une roche volcanique), au visage oblong, à la moue boudeuse ou rêveuse, qui tournent le dos à la mer et veillent sur les vivants…  [...]