Patrimoine en Charente-Maritime : découvrez les « cours mauresques » d’Oléron

logo Sud Ouest

 

https://www.sudouest.fr/2020/05/28/patrimoine-en-charente-maritime-decouvrez-les-cours-mauresques-d-oleron-7520444-1378.php

 

Les maisons dites à cour mauresque continuent d'interroger les amateurs d’architecture locale. © Crédit photo CP

Les maisons dites à cour mauresque continuent d’interroger les amateurs d’architecture locale. © Crédit photo CP

Par Corine Pelletier

Chaque jour, la rédaction de « Sud Ouest » vous présente un trésor du patrimoine architectural ou naturel de la Charente-Maritime propice aux visites même en cette période de crise. Des lieux « ouverts aux quatre vents », accessibles à tous gratuitement et dans le fameux rayon des 100 km. Aujourd’hui, les maisons à « cour mauresque » dans l’île d’Oléron. Même si le terme divise…

Les maisons dites « à cour mauresque » continuent d’interroger les amateurs d’architecture locale. Le terme même divise, et Noël Escudier, auteur d’une série consacrée à l’architecture locale aux « Cahiers d’Oléron », reste dubitatif quant à leur origine et leur vocation. Pour autant, certains auteurs régionalistes du XIXe siècle y croyaient mordicus : il existerait sur Oléron des maisons dont l’architecture aurait été influencée par les pratiques religieuses locales.

Des constructions toujours présentes

 

Ce sont généralement des constructions encore très présentes dans les villages de Chéray (rue Traversière), La Cotinière (rues de la Chapelle, de la Forge, des Caves), Saint-Georges (maison dite du Vieux Presbytère) et La Brée-les-Bains, entourées de très hauts murs dans lesquels s’ouvre une porte passante ou cochère.

Un des plus beaux exemples serait la maison des Aïeules, chère à Pierre Loti. Elle se trouve dans la rue éponyme, dans le bourg de Saint-Pierre. Et ce n’est pas un hasard si le nom de cet auteur, issu de vieilles familles locales protestantes, est associé à ce sujet. En effet, ces maisons évoquant irrésistiblement avec leurs murs blancs et leurs portes vertes certaines rues du Maroc – d’où leur surnom de « mauresques » auraient abrité des familles protestantes.

Tout une histoire

 

Après la Révocation de l’Édit de Nantes, les temps étant devenus très durs pour les protestants contraints par la force à abjurer, ceux-ci auraient perpétué la pratique de leur culte derrière de hauts murs, pour se dérober à la surveillance des voisins catholiques. Souvent issues des classes moyennes supérieures, les familles inventèrent ainsi un style architectural qui leur était propre et lancèrent une mode assez rapidement imitée par les élites locales.

Et c’est aussi à l’abri de ces hauts murs qu’elles décidèrent d’enterrer leurs défunts, après que de nombreux nouveaux convertis se soient vus refuser la sépulture au cimetière. Quand les protestants adoptèrent l’usage de s’enterrer « entre soi », ils lui réservèrent une partie de leurs jardins, avec des tombes très simples réduites souvent à deux pierres (une à la tête, l’autre aux pieds comme dans le Monde Arabe), des stèles nues mais à côté desquelles il était fréquent de planter un rosier, un cyprès puis plus tard un pin parasol ou un laurier-rose. La famille pouvait s’y réunir pour chanter à voix couverte des psaumes.

Lorsque au hasard d’une balade dans une de ces venelles cachées qui font tout le charme des vieilles rues, le promeneur aperçoit au-dessus d’un haut mur la tête d’un cyprès se balançant dans le vent, qu’il puisse avoir une pensée complice pour les défunts qui reposent peut-être encore dans un coin de jardin oublié….