Sur les traces de Pierre Loti, amoureux désespéré en errance dans le Genevois

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Sur les traces de Pierre Loti, amoureux désespéré en errance dans le Genevois – Le Messager
MIS EN LIGNE PAR DOMINIQUE ERNST

 

En 1874, le célèbre écrivain et aventurier est à la recherche d’un amour perdu, son fils Samuel sera lui propriétaire d’une maison à Mornex, sur le Salève.

Inspirateur de nombreux écrivains-voyageurs, Pierre Loti aura connu un destin extraordinaire, entre littérature et aventure.

À Mornex, la résidence les Hutins est sans conteste la plus maritime des maisons du Salève ! Elle a été construite en 1872, par l’architecte genevois Louis Viollier (qui pilota les transformations du collège Calvin et la restauration de la cathédrale Saint-Pierre), pour sa belle-mère Henriette Kunkler-Chastel. Par la suite, cette demeure sera habitée par Adrienne Kunkler et Louis Charlier (1861-1937), qui fut amiral et préfet maritime de Rochefort-sur-Mer.

Il n’est probablement pas venu à Mornex

Les époux Charlier, décédés à Mornex et enterrés au cimetière de Monnetier, ont eu deux filles, Dora et Elsie. Cette dernière épousera Samuel Loti-Viaud, fils (légitime) unique de l’écrivain, officier de marine, chantre de l’orientalisme et académicien Pierre Loti, qui navigua à la même époque et dans les mêmes océans que Louis Charlier.

Vivant à Paris, Samuel et Elsie Loti-Viaud passaient toutes leurs vacances à Mornex. Les Hutins, un nom en lien avec les vignes autrefois élevées sur des arbustes ou des arbres, resteront la propriété des Charlier/Loti-Viaud jusqu’en 1951, date à laquelle la maison sera vendue à l’armée du Salut. Nous ne savons pas si Pierre Loti est venu dans la maison de Mornex, mais la chose est peu probable, car il était déjà âgé et malade à l’époque où son fils a épousé Elsie, en 1920. Cela dit, l’auteur de Pêcheurs d’Islande aurait pu arpenter le Salève un demi-siècle plus tôt, en 1874.

Il apprend qu’il est père mais…

À cette époque, Loti est en poste au Sénégal. Tombé fou amoureux d’une femme mariée à un haut-fonctionnaire résident à Dakar, il vit une liaison passionnée, avant que la belle ne rompe et regagne la France. Sur ses traces, Loti la cherche à Annecy, avant de savoir que son domicile se trouve à Genève. Arrivé dans la cité de Calvin, « il erre le long de quais inconnus, il monte des rues en pente, celles du vieux Genève des Bastions, là il s’arrête, devant un vieil hôtel aristocratique à la porte armoriée ».

Lors de cette nuit du 28 octobre 1874, Pierre Loti apprend tout à la fois qu’il est père et qu’il doit oublier son fils, son amour et toute cette histoire, sous peine de scandale qui nuirait grandement à sa réputation et à sa carrière ! Désespéré, Loti va séjourner à plusieurs reprises dans le Genevois haut-savoyard et à Genève. Il va même se faire passer pour un paysan de l’Oberland bernois fiancé à la nourrice du bébé, afin d’essayer de voir son fils, sans succès. Il est donc probable que Genève cache aujourd’hui quelques descendants illégitimes de Pierre Loti, écrivain-voyageur célébré dans le monde entier.

Pierre Loti, l’écrivain voyageur

Pierre Loti (1850-1923), de son vrai nom Julien Viaud, fut officier de marine, grand voyageur et surtout romancier. Son œuvre, souvent autobiographique, a pour cadre ses voyages à travers le monde, Sénégal, Tahiti, Égypte, Inde ou Japon, avec Madame Chrysanthème, roman à succès qui inspira à Puccini Madame Butterfly. Chantre de l’orientalisme, Loti a paradoxalement connu son plus grand succès littéraire avec un roman peu exotique, Pêcheurs d’Islande, décrivant la vie rude des pêcheurs bretons. Devenu riche et célèbre, il est élu à 42 ans à l’Académie française, contre Émile Zola. Mort à Hendaye, il a droit à des funérailles nationales, avant d’être inhumé sur l’île d’Oléron.