Bienvenue chez Pierre Loti

14 millions d’euros, treize ans de travaux, 34 corps de métiers sollicités… La maison de Pierre Loti a fait l’objet d’une gigantesque remise en éclat. À Rochefort-sur-Mer, en Charente-Maritime, où l’écrivain naquit en 1850, elle ouvrira à nouveau ses portes au mois de mai prochain. Les innombrables objets d’art qui animent le lieu sont aussi passés entre les mains délicates d’artisans restaurateurs, armes orientales, textiles ottomans, tapisseries d’Aubusson…

Hanté par l’angoisse de la mort, Pierre Loti était un collectionneur compulsif. Il n’eut de cesse de transformer sa demeure familiale pour en faire le théâtre de ses extravagances. Julian Viaud, de son vrai nom, officier de marine, a sillonné le globe. De chacune de ses expéditions, il rapporta mille souvenirs afin de reconstituer à terre l’ambiance des paysages visités, des émotions ressenties. Dans cette habitation bourgeoise, il crée un salon turc, une chambre arabe, une pagode japonaise… Les récents travaux de rénovation à la maison de Pierre Loti ont même révélé une chambre espagnole oubliée. Décors ô combien pittoresques qui se prêtèrent à des fêtes costumées restées légendaires. En se déguisant, le romancier-voyageur tentait-il sans doute d’oublier le temps qui passe. Fort du succès de ses ouvrages, « Pêcheur d’Islande » et « Les Derniers jours de Pékin », Pierre Loti, le plus jeune écrivain élu Académicien, à l’âge de quarante et un ans, a les moyens de s’offrir deux maisons mitoyennes.

Il y poursuit ses folles mises en scène, aménage une salle à manger Renaissance, une salle chinoise, une « chambre des momies » où s’entassent des bibelots égyptiens. « J’ai pour règle de conduite de faire toujours ce qui me plaît, en dépit de toute moralité, de toute convention sociale », énonçait-il dans « Aziyadé », son premier roman. Certes. Le plus spectaculaire de ses caprices ? L’installation d’une mosquée au second étage de sa maison. Colonnes de marbre, murs ornés de faïence émaillée, une fontaine, elle fut constituée à partir de vestiges récoltés à Damas. Le public ne se fera pas prier pour aller visiter ce Monument historique.