Musiques au féminin au Pays de Pierre Loti

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Le 29/05/2022 Par Joëlle Rallet

Lili Boulanger et Mel Bonis sont à l’honneur pour cet avant-dernier concert du 18ème Festival Musiques au Pays de Pierre Loti dans la salle de l’Arsenal de la Citadelle du Château d’Oléron.

 

Trois artistes portent le récital dans un univers intime, presque mélancolique, savant maillage entre le texte, l’instrument et la voix.

Mathias Enard, auteur, poète et figure majeure de la littérature française contemporaine, prix Goncourt en 2015, retrace le tumultueux parcours de deux musiciennes, compositrices de la fin du 19ème siècle, où la femme artiste conserve peu de place. Deux grands talents pourtant récompensés pour Lili Boulanger par un prix de Rome, pour Mel Bonis par un premier prix d’harmonie au conservatoire de Paris. Mathias Enard conte, raconte, le verbe est poétique parfois caustique, mais souvent pédagogique reliant les œuvres jouées à la vie des compositrices.

© Odile Motelet

François Dumont, pianiste, lauréat de grands concours internationaux, nommé aux Victoires de la Musique Classique, porte le sens du texte. Un jeu précis, tonique et subtil où chaque note est posée, conduite jusqu’à son ultime souffle. Son plaisir est perceptible, celui de jouer les œuvres de Mel Bonis, de faire connaître cette compositrice et sa musique empreinte de couleurs postromantiques (notamment dans la Barcarolle). C’est avec beaucoup d’émotion que François Dumont interprète La Cathédrale blessée, pièce d’une nostalgie à la fois grave et céleste que Mel Bonis a écrite en hommage à sa fille Madeleine, blessée lors du bombardement de l’église St Gervais durant la première guerre mondiale.

C’est Helen Kearns, soprano d’origine irlandaise, qui vient compléter le duo. Sa voix est homogène sur toute la tessiture, avec des pianissimi maîtrisés dans l’univers intimiste de l’ensemble. Cette musicalité sied pleinement au répertoire des mélodies, bien que le texte français ne soit pas toujours compréhensible. La retenue perceptible laisse pourtant entrevoir une voix puissante dans le Panis Angelicus de César Franck qui demanderait plus de générosité.

© Odile Motelet

Ce voyage musical est salué par le public fidèle de ce Festival créé par Julien Masmondet il y a 18 ans. Une page qui se tourne pour le chef d’orchestre et directeur artistique du Festival, qui souhaite se consacrer pleinement à son ensemble « Les Apaches ». En 2023, c’est le baryton Victor Sicard qui prendra le relais de la direction artistique du festival pour commémorer le Centenaire de la disparition de Pierre Loti, la promesse de belles rencontres musicales à venir…

Mathias Enard, François Dumont et Helen Kearns (© Odile Motelet)