Pierre Loti, homme du Sud ouest

logo Sud Ouest

 

 

Pierre Loti, homme du Sud ouest : Amours, patrimoine et transport ferroviaire (1/2)

Pierre Loti en habit d'académicien, en 1892. © Crédit photo Wiki Commons

Pierre Loti en habit d’académicien, en 1892. © Crédit photo Wiki Commons

 

Par Alain Quella-Villéger
Publié le 07/05/2020

 

Rochefortais, l’auteur de « Pêcheur d’Islande » et de « Ramuntcho » revendiquait son origine saintongeaise. Mais ce grand voyageur a sillonné la grande région et avait fait d’Hendaye un point fixe de sa géographie personnelle et littéraire.

 

Une première version de cet article est parue dans le numéro 113 de la revue Actualité Nouvelle-Aquitaine (été 2016).

 

15 juin 1923. Un wagon spécialement affrété ramène d’Hendaye où il est mort dans l’après-midi du 10, le corps de Pierre Loti. À Rochefort, le 16, on l’embarque sur l’aviso Chamois descendant la Charente pour être inhumé dans le jardin de sa « maison des aïeules », à St-Pierre d’Oléron. Ce dernier voyage (des funérailles nationales ; les précédentes avaient été pour Victor Hugo), du Pays basque à la Saintonge, du continent à l’île atlantique, par train, par bateau, sur fleuve, en mer, semble un résumé de la géographie intime vécue durant des décennies par l’écrivain-voyageur qui revendiqua haut et fort son indéfectible appartenance à la terre charentaise et à « notre région du Sud-Ouest » (Journal, 1er octobre 1910).

« En réalité, je suis un Saintongeais »

« Si quelques Parisiens croient que je suis breton, si tous croient que je suis exotique, en réalité je suis un Saintongeais » (lettre aux Amis du pays d’Ouest, juin 1913). Le nomade impénitent, à bien des égards citoyen du monde, représentant d’une écriture du voyage oscillant entre grand reportage impressionniste et poésie empreinte de nostalgie – regard ethnologue, écriture décoloriste (qui délave, qui efface, ndlr), personnalité flamboyante –, est incontestablement un enraciné. « Une chose par exemple que je m’accorde, et que personne ne peut me refuser, c’est cet attachement profond que mon père m’avait inculqué dès mon enfance pour notre ville, pour ses entours, même pour nos vieux remparts, hélas menacés, et pour tout notre coin de province » (discours de remerciement lorsque sa ville reconnaissante le fêta, le 26 janvier 1910).

Lorsqu’il a été nommé commandant du Javelot, sur la Bidassoa, en octobre 1891 et que le Pays basque a alors succédé pour seconde patrie à la Bretagne, Loti devint l’usager d’un nouvel espace régional. On peut ainsi déceler dans sa vie comme dans son œuvre une cartographie aux airs d’‘‘Arc atlantique’’.

Sédentaire mais voyageur

Il suffit de lire son journal intime en cours de publication intégrale pour reconstituer une cartographie inédite, où le nomade impénitent circule à cheval, en calèche, en voiture « traînée par deux poneys basques » (le pottok), à bicyclette aussi. Celui qui revendique sa sédentarité comme une patrie jamais négociable, ne cesse de la quitter, sinon de la trahir pour mieux ou meilleur sans doute y revenir. Et celui qui associe la modernité technologique à une catastrophe, refusant l’électricité domestique et toute vision positiviste de l’industrialisation, ne cesse d’avoir recours aux nouveaux moyens de transport.

L’automobile (au masculin), n’en parlons pas, il l’abomine ! Le 9 octobre 1905, par exemple : « Déjeuné à Biarritz chez les Thomson. Vers 4 h, Mme Thomson m’emmène, par ordre, acheter une casquette d’automobile, et me fait monter pour la première fois de ma vie dans une de ces machines-là. 200 kilomètres, parcourus d’une allure folle, les virages défilant comme des tableaux de fantasmagorie. Un froid qui cingle le visage – À 8 h ½, nuit noire, je suis ramené à Hendaye, comme par une trombe. »

Un marin toujours entre deux trains

Mais Loti est né avec le développement du transport ferroviaire. Le train, s’il n’en sera jamais le panégyriste, sera son complice. Viaud (pour l’état-civil) le marin prend le bateau, c’est la moindre des choses, mais Loti l’écrivain-voyageur passe sa vie entre deux trains. La ligne Rochefort-Paris le reçoit certes prioritairement, encore que la centralisation qui accentue tellement l’hypertrophie de la capitale touche moins cet officier ralliant plus volontiers Lorient, Cherbourg, Marseille ou Toulon.

On perçoit une évolution dans cette géographie originale qui structure désormais son espace mental. Une sorte d’archéologie de la circulation à la Belle Époque s’y révèle aussi, qui ne manque pas d’intérêt.

Les années de jeunesse et de jeune officier pauvre, marquées par les grands voyages initiatiques autour du monde, se rétrécissent le plus souvent en France aux espaces généalogiques : Oléron (St-Pierre, Sauzelle, Boyardville, La Cotinière, mais jamais St-Trojan) ; Saint-Porchaire où vit un temps sa sœur aînée ; Échillais. Lorsque l’écrivain entre dans l’arène littéraire, dans les années 1880, quelques amis dans la mouvance du romancier régionaliste Émile Pouvillon l’attirent du côté de Montauban, mais il s’agit d’un midi extérieur à notre actuelle région (tout comme le Bretenoux cher à son adolescence, en Quercy).

Un espace polarisé autour de Rochefort 

Durant les années 1890, celles où Loti écrit Le Roman d’un enfant, les rêves d’ubiquité, de déguisement, de dédoublement, s’articulent aisément avec l’identité de terroir, dans un espace polarisé autour de Rochefort : l’île d’Oléron, toujours, et sans accent sur l’e (c’est en février 1899 qu’il rachète à St-Pierre la « maison des aïeules » et le 24 avril qu’il y fait son grand retour), Marennes, Fouras, Saintes aussi et les petits ports fluviaux de la Charente (St-Savinien, Taillebourg). Mais la fortune et la gloire (Pêcheur d’Islande en 1886, l‘Académie française en 1891) entraînent désormais une mobilité nationale où Paris – qu’il déteste – devient le lieu des salons et des excentricités. La respiration profonde est ailleurs, vers ces suds qui nourrissent un tropisme addictif commencent dès la Charente traversée (en 1900, par un pont transbordeur qu’évidemment Loti déteste).

Mariage et ancrage à Bordeaux… et Arcachon

Le mariage avec Blanche Franc de Ferrière introduit un ancrage bordelais (et, accessoirement, en Dordogne, sur les terres de son épouse et de sa belle-famille : Lamonzie-St-Martin ; Vidasse, à Pessac-sur-Dordogne), mais il n’est qu’étape dans une circulation méridienne motivée par une mobilité pendulaire alternant le piémont pyrénéen (l’été, mais aussi à Noël) et le marais rochefortais. Son marin-domestique Osman (le prénom turc est authentique et point une coquetterie orientaliste du maître) l’attire vers le bassin d’Arcachon.

Une toponymie ferroviaire s’installe, oubliée aujourd’hui. 3 août 1903 : « À 1 h ½, je quitte Rochefort, la maison dans le bouleversement des grands départs, la salle Renaissance encombrée de mes caisses pour Constantinople. À 5 h, à Bordeaux je trouve Samuel, qui va lui aussi au mariage d’Osman et nous prenons le train pour Arcachon. À Facture, la jolie tête souriante d’Albert Elliès, venu au-devant de moi, paraît à la portière. À Lamothe, mon cher Osman paraît aussi et monte avec nous. Ils combinent de descendre tous à Gujan-Mestras, tandis que je continue jusqu’à la Hume. » (Facture est une gare sur la ligne d’Irun et Lamothe une autre, aujourd’hui désaffectée, alors embranchement vers Irun ou Arcachon).

Un épicentre, la gare d’Hendaye 

Il faut dire que le train permet de commodes arrangements d’emploi du temps… 6 août 1903 : « Je suis censé n’être arrivé à Bordeaux que vers 2 heures de l’après-midi, et je vais rue Cornac, prendre Blanche et Samuel. À 5 heures nous prenons ensemble le train du Midi. Ils continuent tous deux sur Hendaye, et je m’arrête à Morcenx pour un rendez-vous encore, infiniment plus désiré que ceux d’hier »…

La gare d’Hendaye est-elle à Loti ce que fut celle de Perpignan à Dali ? Peut-être. Elle est souvent l’épicentre de ses errances, celle où l’attendent des domestiques attentifs, l’amour transi de Berthe Durruty, ou les promesses de quelques jeunes ombres sensuelles : « À Hendaye où j’arrive à 10 h du soir, Tiburcio m’attend. Nous entrons ensemble dans la petite maison, – et il semble qu’à cette arrivée en pleine nuit, on y surprenne les mille souvenirs et fantômes qui y dormaient, dans le silence d’abandon » (28 février 1903).

A suivre, second volet consacré au « Pays basque, nouvelle patrie et nouveau lieu d’écriture ».

Alain Quella-Villéger est historien, professeur agrégé, spécialiste et biographe de Pierre Loti (1). Il vient de publier « Pierre Loti, une vie de roman » (Calmann-Lévy), qui a reçu le prix Jules-Verne 2020.

 

Pierre Loti, homme du Sud ouest : Le Pays basque, nouvelle patrie et autre lieu d’écriture (2/2)

 

Le célèbre auteur de Ramuntcho a choisi, dès la fin du XIXe siècle, le Pays basque comme deuxième patrie. © Crédit photo Wiki Commons

Le célèbre auteur de Ramuntcho a choisi, dès la fin du XIXe siècle, le Pays basque comme deuxième patrie. © Crédit photo Wiki Commons

Par Alain Quella-Villéger
Publié le 07/05/2020

 

Rochefortais, l’auteur de « Pêcheur d’Islande » et de « Ramuntcho » revendiquait son origine saintongeaise. Mais ce grand voyageur a sillonné la grande région et avait fait d’Hendaye un point fixe de sa géographie personnelle et littéraire.

 

Une première version de cet article est parue dans le numéro 113 de la revue Actualité Nouvelle-Aquitaine (été 2016).

 

Le Pays basque, cette nouvelle patrie, réunit les avantages d’une vie libre, sportive, retirée, mais aussi mondaine. L’ami des têtes couronnées, même déchues, s’éprend de grande amitié pour Nathalie de Serbie et lui rend souvent visite à Biarritz (la première, le 22 mai 1892), même s’il est plutôt un habitué de Saint-Jean-de-Luz ou de Bayonne (une vieille amie d’enfance y réside). Outre de lui offrir une compagne nourrissant de facto sa bigamie assumée (Crucita Gainza, « l’Espagnole », rencontrée fin novembre 1893), le Pays basque réserve le charme pittoresque des villages Ascain ou Aïnhoa, sans oublier la contrebande.

Relire la journée du 15 juin 1893, à Dantcharinea (transposée dans Ramuntcho), ou bien ce lundi 24 août 1903 : « Dans le train de 5 h ½ du soir, à St-Jean-de-Luz, avec Blanche et Samuel, pour la visite de chaque année aux Baignol et à ma vieille amie Melle Jacoba. Je la quitte à 7 heures, et une petite voiture m’emmène, pour Sare, vers Dantcharrinea, pour une équipée de contrebande, avec les camarades contrebandiers d’autrefois. Deux heures et demie de route dans la nuit pluvieuse, jusqu’à la sombre petite auberge. De minuit à 3 heures, à la contrebande des chevaux ; une fois encore, je me retrouve dans la forêt pyrénéenne, sous la pluie chaude, aux heures mystérieuses d’une nuit très noire… »

Ni adresses de restaurants, ni recettes gastronomiques 

Parfois, un syncrétisme inattendu trouve refuge au-dessus de la Bidassoa. Mercredi 13 septembre 1903 : « J’ai les Thomson à déjeuner, avec le peintre André Brouillé. Osman leur sert des huîtres de son parc. Je les emmène à Biriatou, voir la vieille église et le délicieux monastère. » Peu d’adresses de restaurants, point de recettes gastronomiques avec Loti ; lui qui organisa de célèbres repas, comme la fête Louis XI, n’a rien d’un gourmet gourmand ! Si son nom sera donné plus tard à un cognac (sa visite à Matha, en juin 1879, est indifférente aux vignobles), il ne boit pas d’alcool et est quasiment végétarien. Qu’on ne compte donc pas sur lui pour promouvoir apéritifs, poulets et fromages de pays ! Ni pour photographier gares et sites emblématiques.

Des joueurs de pelote basque aux vieux paysans de Saint-Fort sur Gironde, des baigneurs de la plage d’Hendaye à l’ouvrier maçon pendant la construction de la ‘‘mosquée’’ de sa maison, ses photos montrent plutôt le quotidien des vies, jamais le tourisme. Ses quelques dessins régionaux ne laissent place qu’aux paysages des environs de Rochefort (Échillais) et aux bois de la Roche Courbon. Dessins, photos et écrits participent à la narration autobiographique ; il faudrait y ajouter l’herbier fétichiste des petits bouquets ficelés, où surgissent des lieux à forte densité affective. Comme la Gataudière, près de Marennes, où Loti vient volontiers « cueillir des roses sur la terrasse. On entend Maumusson qui fait grand bruit » (28 novembre 1887).

L’île d’Aix ou la Rhune, inconnues de Loti

Une lecture quantitative de la mobilité, des temps de trajets – par exemple, en 1892 : départ de Rochefort à 4 h de l’après-midi, arrivée à Bordeaux à 10 h (« hôtel près de la gare »), nouveau départ à 7 h pour rejoindre Hendaye à 11 h 30. Il faut une nuit en train express pour revenir d’Hendaye ou si c’est en journée, partir à 1h ½ pour arriver à minuit et demie.

On peut aussi chercher les angles morts, les terrae incognitae sur la carte « lotienne » : Loti n’est pas allé dans l’île d’Aix, n’est pas monté à 905 m. d’altitude au sommet de la Rhune, si souvent nommée (et parfois « d’un violet lumineux et rose », 23 décembre 1897), se contenant du mont Aldabe (224 m.) sur le versant espagnol des Pyrénées (à Irun : voir son « gai pèlerinage de la saint-Martial », en juin 1899).

De Dax à Poitiers, étapes de hasard

Dax, Cambo, Orthez, Pau, Saintes ne sont que des étapes de hasard, comme Bazas le temps d’une affaire mystérieuse (18 septembre 1899), même si l’amoureux s’égare volontiers dans quelque village landais (20 août 1898). On le voit fugitivement à Royan, à Pontaillac (c’est d’ailleurs, enfant, à St-Georges de Didonne qu’il avait découvert la mer), voire dans l’ile de Ré aussi (1er septembre 1890). Au nord, il ne découvre que très tardivement – avec ravissement – La Rochelle (« Et je suis sous le charme », 19 mai 1906), cite deux fois le « vieux village saintongeais » d’Esnandes, mentionne Marans ou Niort et ne s’arrête à Poitiers que lors d’une correspondance ferroviaire, le temps d’une promenade aux jardins de Blossac (25 septembre 1881). Le nom de Limoges n’apparaît jamais. L’homme des marais n’est pas arpenteur de montagnes ; le marin se méfie des forêts. Et aucune rencontre ou relation ne l’y a conduit.

Les premiers temps de l’homme

Quels que soient les lieux, il est toutefois un humus commun, une matrice homogène : le passé. Jean-Richard Bloch a judicieusement remarqué qu’avec Loti, en matière de passé, on est bien servi : « ce passé est de belle qualité puisqu’il jette ses racines jusqu’aux premiers temps de l’homme » (Europe, 1er octobre 1923). Or, les descriptions de Loti passent leur temps (c’est une manière de parler) à faire trépasser du temps, à le concasser, à le remodeler aussi, à jouer avec les uchronies. Une description écrite au présent plonge volontiers dans les périodes précambriennes. Pour désigner une partie du mystère provincial, « le je-ne-sais-quoi inexprimable caché la nuit au fond des bois » (de la Limoise, à Échillais), celui des restes de Gaule primitive, Loti invente le terme « elmique ».

Chez lui, le passé est aussi source vive

On ne saurait pourtant réduire l’œuvre et la pensée de Loti à sa dimension atavique et obsessionnelle des temps enfuis, de la ruine, de la mort. Le passé n’est pas fatalement un fardeau paralysant, mais constitue aussi une source vive, pleine de forces dynamiques en quête de traces (des illusions perdues, des autres, de soi-même, des peuples) et alimentant un appétit identitaire roboratif. Le passé y est un levain. Aussi Loti se fait-il volontiers défenseur du patrimoine, comme pour le site pyrénéen de Gavarnie, ou pestant contre les spéculateurs immobiliers qui dénaturent la beauté du littoral.

De ces itinéraires au fil d’un emploi du temps très riche naît une carte par anamorphose, dont les distorsions, révèlent l’homme qui l’habite, éternel insatisfait et jouisseur, marin toujours même à terre où les villages sont des ports, où même les trains sont hauturiers : « j’ai pris suivant l’habitude le côté de l’ouest dans mon wagon, pour voir s’ouvrir, après la longue et monotone traversée des Landes, le golfe de Biscaye » (24 décembre 1895).

L’Aquitaine, grand périmètre avec vue sur mer

De l’imaginaire géographique à la géographie de l’imaginaire, il n’y a qu’un pas, qu’un déplacement – et d’autant plus chez celui qui préféra aux romans historiques (ici-autrefois) les romans géographiques (ailleurs-maintenant ; on dit aussi « roman géographes »). Aussi peut-on gloser sur la représentation que se fait et que nous donne Loti de ce grand espace aquitain et proches si affinités. C’est un périmètre avec vue sur la mer, où l’écrivain puise ses propres mythes, avec des sociétés supposées figées dans une intemporalité rassurante : grottes (Isturitz, Roche Courbon), villages vermoulus (Sare, « toujours exquis, mélancolique et vieux », 13 octobre 1895), mer toujours recommencée, rites, chants et religion venus des temps immémoriaux ; langues aussi.

Notons toutefois que, si le lexique du Journal de Loti contient bien des traces du parler saintongeais ou des vocables bretons (sans compter toutes les occurrences turques, japonaises, polynésiennes ou autres), Loti, si perméable aux langues, n’a pas du tout appris le basque (au moins cite-t-il l’ongui etorri de la bienvenue et a-t-il donné un nom basque à sa maison d’Hendaye, le 6 août 1899).

Lieu des origines et lieu des possibles

Cet univers polymorphe est le lieu de l’écriture, mais Loti ne pense pas, comme aujourd’hui Annie Ernaux, que l’écriture soit son « vrai lieu ».
De wagons de première en train-express, mais aussi du Roman d’un enfant (1890) à Ramuntcho (1897), se déploie un « pays » matriciel réel, à la fois conservateur et subversif, à la fois lieu des origines et des possibles (avec ses multiples amours, ses amitiés renouvelées, sa puissance d’éternelle jeunesse), mais aussi une frontière ouverte vers l’Espagne, vers l’Afrique (les villages d’Oléron sont blancs comme des « villages mauresques » et la Roche-Courbon garde en juin 1908 « son air tropical »), et pour tout dire fantasmé et exotique chez celui qui stipulait qu’« il n’y a d’urgent que le décor »…

Alain Quella-Villéger est historien, professeur agrégé, spécialiste et biographe de Pierre Loti (1). Il vient de publier « Pierre Loti, une vie de roman » (Calmann-Lévy), qui a reçu le prix Jules-Verne 2020.

Pierre Loti une vie de roman Calmann-Lévy-AQV